Culture 4 Md€ - 2024
Sources : Rapports annuels de performances - comptes financiers des opérateurs en comptabilité générale
Opérateur | Ressources | Part du financement public | Dont taxes affectées | Part | |
CNC - Centre national du cinéma et de l'image animée | 0,9 Md€ | 93.4 % | 0.84 Md€ | 23.1 % | |
Musée du Louvre | 0,32 Md€ | 30.6 % | - | 8.1 % | |
BnF - Bibliothèque nationale de France | 0,28 Md€ | 74.39 % | - | 7.3 % | |
Opéra national de Paris | 0,25 Md€ | 40.15 % | - | 6.5 % | |
INRAP - Institut national de recherches archéologiques préventives | 0,2 Md€ | 48.72 % | 0 Md€ | 5.1 % | |
CMN - Centre des monuments nationaux | 0,19 Md€ | 28.09 % | - | 4.9 % | |
CNAC-GP - Centre national d'art et de culture - Georges Pompidou | 0,17 Md€ | 47.44 % | - | 4.3 % | |
EPV - Etablissement public du musée et du domaine national de Versailles | 0,16 Md€ | 23.69 % | - | 4.2 % | |
Rmn-GP - Réunion des musées nationaux - Grand Palais | 0,15 Md€ | 18.63 % | - | 3.8 % | |
Universcience | 0,13 Md€ | 67.28 % | - | 3.4 % | |
EPCMPP - Etablissement public de la Cité de la musique - Philharmonie de Paris | 0,11 Md€ | 53.52 % | - | 2.9 % | |
CNM - Centre national de la musique | 0,11 Md€ | 90.68 % | 0.07 Md€ | 2.8 % | |
Musée d'Orsay et musée de l'Orangerie | 0,1 Md€ | 37.49 % | - | 2.5 % | |
Ecoles d'architecture - Ecoles nationales supérieures d'architecture | 0,09 Md€ | 73.68 % | 0 Md€ | 2.3 % | |
EPMQB - Etablissement public du musée du quai Branly | 0,07 Md€ | 70.14 % | - | 1.7 % | |
EPPGHV - Etablissement public du parc et de la grande halle de la Villette | 0,07 Md€ | 41.88 % | - | 1.7 % | |
Comédie Française | 0,04 Md€ | 46.19 % | - | 1.1 % | |
CNSMD Paris - Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris | 0,04 Md€ | 76.85 % | - | 1.0 % | |
MuCEM - Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée | 0,04 Md€ | 54.43 % | - | 0.9 % | |
Etablissement public du Mobilier National | 0,03 Md€ | 89.04 % | - | 0.9 % | |
CNL - Centre national du livre | 0,03 Md€ | 96.41 % | - | 0.8 % | |
CAPA - Cité de l'architecture et du patrimoine | 0,03 Md€ | 72.97 % | - | 0.7 % | |
Musée Picasso | 0,03 Md€ | 100 % | - | 0.7 % | |
Opéra comique | 0,02 Md€ | 51.94 % | - | 0.6 % | |
EPMSM - Etablissement public du Mont-Saint-Michel | 0,02 Md€ | 19.22 % | - | 0.6 % | |
Chaillot – Théâtre national de la Danse | 0,02 Md€ | 72.81 % | - | 0.5 % | |
TNO - Théâtre national de l'Odéon | 0,02 Md€ | 67.25 % | - | 0.5 % | |
EPRNDP - Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris | 0,02 Md€ | 69.73 % | - | 0.5 % | |
Ecoles d'art en Région | 0,02 Md€ | 73.15 % | 0 Md€ | 0.5 % | |
ENSAD - Ecole nationale supérieure des arts décoratifs | 0,02 Md€ | 72.52 % | 0 Md€ | 0.5 % | |
CNSMD Lyon - Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon | 0,02 Md€ | 87.85 % | 0 Md€ | 0.4 % | |
ENSCI - Ecole nationale supérieure de création industrielle | 0,02 Md€ | 38.74 % | 0 Md€ | 0.4 % | |
EPPD - Etablissement public du palais de la porte Dorée | 0,02 Md€ | 76.64 % | - | 0.4 % | |
ENSMIS - Ecole nationale supérieure des métiers de l'image et du son | 0,01 Md€ | 80.04 % | - | 0.4 % | |
ENSBA - Ecole nationale supérieure des beaux-arts | 0,01 Md€ | 68.85 % | 0 Md€ | 0.4 % | |
TNC - Théâtre national de la Colline | 0,01 Md€ | 69.94 % | - | 0.4 % | |
CNAP - Centre national des arts plastiques | 0,01 Md€ | 72.71 % | - | 0.3 % | |
TNS - Théâtre national de Strasbourg | 0,01 Md€ | 78.07 % | - | 0.3 % | |
OPPIC - Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la Culture | 0,01 Md€ | 98.28 % | - | 0.3 % | |
Musée Guimet | 0,01 Md€ | 38.12 % | - | 0.3 % | |
CND - Centre national de la danse | 0,01 Md€ | 79.1 % | - | 0.3 % | |
INP - Institut national du patrimoine | 0,01 Md€ | 78.75 % | - | 0.3 % | |
BPI - Bibliothèque publique d'information | 0,01 Md€ | 94.02 % | - | 0.3 % | |
Etablissement public du château de Fontainebleau | 0,01 Md€ | 36.36 % | - | 0.3 % | |
AFR - Académie de France à Rome | 0,01 Md€ | 44.59 % | - | 0.2 % | |
Ecole du Louvre | 0,01 Md€ | 24.98 % | - | 0.2 % | |
EPCCSL - Etablissement public Cité de la céramique - Sèvres et Limoges | 0,01 Md€ | 59.56 % | - | 0.2 % | |
CNSAD - Conservatoire national supérieur d'art dramatique | 0 Md€ | 91.51 % | - | 0.1 % | |
Musée Henner-Moreau | 0 Md€ | 53.46 % | - | 0.0 % | |
Cinémathèque française | - | - | - | - | |
CNAC - Centre national des arts du cirque | - | - | - | - | |
Ensemble intercontemporain | - | - | - | - | |
Musée des arts décoratifs | - | - | - | - |
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Que penser des écoles des beaux-arts en France ?
La France compte 12 écoles nationales supérieures d’art (ENSA), dont l' École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris (ENSBA), fondée en 1648.
À côté de ces ENSA, on trouve environ 34 écoles supérieures d’art et de design (ESAD) territoriales publiques.
En tout, on recense près de 84 établissements d’art en France, couvrant des disciplines allant des beaux-arts traditionnels à la création numérique.
Les principales critiques
Sous-financement et fermetures : plusieurs écoles sont menacées par des coupes budgétaires. L’ESAD de Valenciennes a par exemple annoncé sa fermeture définitive en 2025, et d’autres établissements publics craignent le même sort.
Inégalités territoriales : les grandes écoles parisiennes (ENSBA, ENSAD) bénéficient d’une visibilité et de ressources supérieures, tandis que les écoles régionales peinent à maintenir leurs activités.
Débouchés incertains : Le marché de l’art reste précaire. Beaucoup d'étudiants doivent compléter leur parcours par des expériences professionnelles ou se tourner vers l’enseignement, la médiation culturelle ou le design.
Tensions pédagogiques : certains reprochent aux écoles de rester trop centrées sur l’expérimentation libre, sans assez de formation technique ou professionnelle. D’autres estiment au contraire que la liberté créative est leur force, mais qu’elle n’est pas suffisamment accompagnée par un soutien à l’insertion professionnelle.
Manque de reconnaissance institutionnelle : malgré leur rôle culturel, les écoles d’art sont parfois considérées comme marginales dans l’enseignement supérieur, ce qui fragilise leur position face aux universités ou aux écoles privées.
Les débats actuels
Les Assises nationales des écoles d’art et de design de Marseille, début novembre 2025 (1), ont mis en lumière les enjeux : égalité des chances, conditions d’enseignement, et avenir de la création artistique dans un contexte de crise.
La ministre de la Culture a même évoqué la possibilité de fermer certaines écoles jugées « en situation de crise », ce qui a provoqué un choc dans le milieu.
Les directeurs et enseignants insistent sur la nécessité de repenser l’enseignement artistique à l’horizon 2050, en intégrant davantage les enjeux numériques, écologiques et sociaux.
En résumé
Les écoles des beaux-arts en France restent des lieux de création et de liberté artistique, mais elles souffrent de fragilités structurelles : financement insuffisant, manque de reconnaissance académique, et insertion professionnelle difficile. Leur avenir dépendra de leur capacité à se réinventer et à mieux articuler expérimentation artistique et réalités socio-économiques.
1/ Communiqué de presse – Assises nationales des écoles d’art et de design 2025 à Marseille
L'ANdÉA réaffirme la force, la responsabilité et les valeurs du service public de la création.
Plus qu’une conférence, plus qu’un état des lieux, Demain l’école d’art : horizon 2050 est une déclaration d’urgence, une invitation à la mobilisation de l’intelligence collective.
Les Assises nationales des écoles d’art et de design 2025, organisées à Marseille par l’ANdÉA (Association nationale des écoles supérieures d’art et design publiques) en partenariat avec l’ANÉAT (Association nationales des écoles d’art territoriales de pratiques amateurs) et l’APPÉA (Association nationale des prépas publiques aux écoles supérieures d’art), représentant l’ensemble de la filière de l’enseignement artistique, ont réuni pendant trois jours plus de 500 participant·es : étudiant·es, enseignant·es, technicien·es, directeurs et directrices, personnels administratifs, bibliothécaires, artistes, chercheur·euses, élu·es, partenaires institutionnels et représentant·es des ministères.
Ces rencontres ont été l’occasion d’un dialogue riche, passionné, intense, parfois vif, avec le souci de la justesse et de la lucidité, toujours au service d’une pensée pour l’avenir du service public de l’enseignement artistique. Les nombreuses voix qui composent nos écoles s’y sont exprimées, illustrant la vitalité, la pluralité et la force critique d’un réseau profondément attaché à ses missions d’intérêt général. Les échanges ont réaffirmé avec force que les écoles d’art et de design sont des espaces irremplaçables de liberté d’expression, de création et de pensée critique sur l’ensemble du territoire. Dans un monde où ces libertés sont attaquées, parfois violemment remises en cause, il est plus que jamais nécessaire de préserver et défendre ces lieux d’expérimentation et de transmission, au cœur de la vie démocratique et culturelle.
L’ANdÉA appelle à un engagement des tutelles pour garantir des moyens à la hauteur des missions de ces établissements, dont la fragilisation économique met en péril la pérennité et la qualité du service public de la création.
L’événement a été profondément bouleversé par la diffusion d’une liste anonyme circulant sur les réseaux sociaux, dans le sillage d’Art Basel Paris, visant plusieurs personnalités du monde de l’art et des écoles. Ce contexte a abouti à l’annulation d’une table ronde. Cette situation a suscité une vive émotion parmi les participant·es et a soulevé la nécessité de la liberté du débat démocratique, sur des sujets de première importance pour les étudiant·es comme pour l’ensemble de la communauté des écoles d’art, dans le respect des personnes et de leurs diversités.
L’ANdÉA condamne avec la plus grande fermeté toutes les formes de violences et de discriminations, et reconnaît leur caractère structurel au sein du monde de l’art et de l’enseignement, comme dans la société tout entière. Ces violences exigent des réponses collectives, durables et responsables, fondées sur l’écoute, la formation, la prévention et la justice.
L’ANdÉA réaffirme son engagement à lutter sans relâche contre les violences sexistes, sexuelles et morales, à soutenir les victimes, à mettre en œuvre des dispositifs légaux et respectueux des personnes concernées et à refuser toute démarche qui s’apparenterait à un tribunal parallèle. L’ANdEA entend les colères tout en travaillant à garantir des règles communes, gages d’un sérieux plus que jamais nécessaire ; elle appelle les tutelles à un travail urgent et efficient pour que les écoles de l’enseignement supérieur Culture soient dotées d’accompagnements et d’outils structurels et financés.
La parole étudiante s’est exprimée avec force et engagement militant. Certain·es ont fait part de leur déception de ne pas avoir eu suffisamment d’espace dans les discussions et les assemblées. L’ANdÉA entend cette critique et en prend acte.
Nous comprenons et affirmons la nécessité de repenser, dès à présent, les formes de participation étudiante au sein de notre association. L’avenir du service public de la création ne peut se construire sans la voix de celles et ceux qui y apprennent, y vivent et y expérimentent.
Après la fermeture de trois écoles supérieures d’art, à Rueil-Malmaison en 2011, à Perpignan en 2016 et à Valenciennes en juin 2025, il faut sans tarder protéger un modèle fragilisé et rappeler la contribution essentielle de la création au bien commun.
Ouvrir la réflexion sur l’avenir de la création
Pour Ulrika Byttner, co-présidente de l’Andéa et directrice de l’École supérieure d’art et design Le Havre-Rouen, ces Assises marquent un tournant. « Nous voulons réfléchir à l’initiation artistique dès l’enfance et à la formation tout au long de la vie », explique-t-elle lors d’une conférence de presse donnée mi-octobre.
Une vingtaine de tables rondes rythment les débats, autour de grands thèmes : enseignement de la création, égalité des chances, conditions de travail des artistes et des designers. L’objectif est clair : bâtir une politique durable pour l’enseignement public de l’art et du design à l’horizon 2050, dix ans après les précédentes Assises organisées à Lyon en 2015.
Un contexte tendu pour les écoles d’art publiques
Ces discussions interviennent alors que le climat reste préoccupant. En juin 2025, l’École supérieure d’art et de design de Valenciennes — institution bicentenaire — a dû fermer, faute de financement. Deux autres écoles avaient déjà disparu à Rueil-Malmaison et à Perpignan, respectivement en 2011 et 2016.
« L’intérêt des jeunes pour nos formations explose, mais nos capacités d’accueil stagnent », note Ulrika Byttner. Les écoles doivent faire face à une hausse massive des candidatures sans moyens supplémentaires. Dans le même temps, l’enseignement privé gagne du terrain, rendant encore plus urgente la défense d’un service public de qualité.
Une filière en quête de stabilité et de reconnaissance
Bernhard Rudiger, vice-président de l’Andéa et professeur aux Beaux-arts de Lyon, souligne « un besoin croissant dans la société, notamment pour des cours du soir et des formations accessibles ». Mais l’équilibre financier des écoles reste fragile.
L’Andéa, qui regroupe environ 12 000 étudiants, veut clarifier les relations entre l’État et les collectivités, souvent sources de tensions budgétaires. Parmi les enjeux : garantir l’égalité des chances dans un système où certaines écoles accueillent jusqu’à 70 % de boursiers, et anticiper le vieillissement du corps enseignant.
Un signal d’alarme pour l’enseignement artistique
Les organisateurs des Assises appellent à définir un schéma directeur ambitieux et partagé, capable de dépasser les blocages actuels : diversité des statuts, sous-financement, absence de cadre national et inégalités de traitement.
Ces quatre journées marseillaises sonnent comme un avertissement pour une filière trop souvent sous-estimée. « Nos écoles des Beaux-arts ne peuvent plus couvrir leurs dépenses. Nous faisons face à une situation critique », conclut Bernhard Rudiger. Le défi : garantir la survie et la reconnaissance d’un enseignement essentiel à la vitalité culturelle du pays.
La question des écoles d'arts en France revient dans le débat public, et la réponse porte sur une éventuelle suppression ou bien sur une nécessaire transformation ?
Les écoles d'arts sont majoritairement financées par l’État et les villes, le coût demeure élevé pour les collectivités et le retour sur investissement reste faible en termes d’emplois stables, avec une insertion professionnelle très aléatoire pour les nombreux élèves diplômés qui peinent à vivre de leur pratique artistique. Le modèle économique du champ artistique reste précaire et, plus ou moins, tributaire des relations et connaissances du milieu.
Réformer plutôt que supprimer ?
Faut-il supprimer les écoles des Beaux-Arts ? Sans aucun doute, si celles-ci refusent de se transformer en profondeur.
La disparition des écoles des Beaux-Arts peut paraître choquante tant elles bénéficient d’un fort capital symbolique et historique. Pourtant, dans leur forme actuelle, elles posent un problème démocratique, économique et culturel majeur. Maintenir ces institutions sans remise en question radicale revient à financer, avec de l’argent public, un système largement déconnecté des réalités sociales.
Tout d’abord, les écoles d'arts produisent une précarité structurelle. Elles forment chaque année des centaines d’étudiants à des carrières dont elles savent pertinemment qu’elles sont extrêmement limitées. La majorité des diplômés ne vivra jamais de son art, tout en ayant été encouragée à croire à une réussite fondée sur la vocation plutôt que sur la réalité économique. Cette situation pose un problème éthique : peut-on légitimement former à plein temps à des métiers sans débouchés réels ?
Ensuite, malgré leur image progressiste, les Beaux-Arts fonctionnent comme des espaces de reproduction sociale et culturelle. Le langage théorique, les codes esthétiques et les réseaux valorisés favorisent ceux qui disposent déjà d’une certaine liberté culturelle et économique. Loin de démocratiser l’art, ces écoles contribuent souvent à renforcer une forme d’élitisme déguisé, où la reconnaissance dépend davantage de l’adhésion à des normes implicites que de la créativité elle-même.
Par ailleurs, l’art qui y est promu est fréquemment coupé du public. En privilégiant des pratiques conceptuelles hermétiques, les Beaux-Arts participent à la rupture entre création contemporaine et société. L’argent public finance ainsi des œuvres et des discours qui ne s’adressent qu’à un cercle restreint de professionnels et d’institutions, alimentant la défiance envers l’art contemporain.
Dans un contexte de contraintes budgétaires, la question de la priorité des dépenses publiques ne peut être évacuée. Faut-il continuer à investir massivement dans des formations dont l’impact social reste très faible, alors que l’éducation, la santé, la sécurité avec, plus récemment, l'idée de réarmement, manquent de moyens ? La culture ne peut se soustraire indéfiniment à l’exigence de responsabilité collective.
Si les écoles d'arts demeurent incapables de se réformer en assumant une véritable transparence sur les débouchés, en s’ouvrant à des pratiques concrètes, socialement engagées, et en rompant avec leur entre-soi, leur suppression ne deviendrait plus improbable, mais sans doute politiquement incontournable. Défendre la création artistique ne signifie pas défendre toutes ses institutions sans esprit critique et envers et contre tous.
Les écoles des Beaux-Arts en France : un modèle isolé ?
Le débat sur l’avenir des écoles d'arts en France gagne à être éclairé en observant les modèles étrangers. On remarque que la France se distingue par un attachement à une formation artistique publique, gratuite ou peu coûteuse, mais également par une sérieuse difficulté à adapter ces formations aux réalités contemporaines.
En France, les écoles des Beaux-Arts sont majoritairement publiques, financées par l’État et les collectivités territoriales. Leur mission repose sur la liberté artistique, l’expérimentation et la recherche plastique. L’insertion professionnelle n’est pas prise en compte, son aspect financier jamais évoqué, ce qui explique les critiques récurrentes sur la précarité des diplômés.
Au Royaume-Uni et aux États-Unis, les écoles d’art sont souvent intégrées aux universités ou relèvent du secteur privé. Les frais d’inscription sont élevés, ce qui rend l’accès socialement plus sélectif. En contrepartie, ces formations mettent l’accent sur la professionnalisation, le développement de réseaux, la préparation au marché de l’art, du design ou de l’industrie connexe. Ce modèle favorise une insertion plus réaliste.
En Allemagne, en Suisse ou dans les pays nordiques, les académies d’art sont également publiques, mais sélectives par le nombre d’étudiants limité, et l’accompagnement individualisé est renforcé. L’objectif est de ne pas former trop d’artistes tout en leur offrant de meilleures conditions de travail et de reconnaissance.
Dans des pays comme la Corée du Sud ou le Japon, les écoles d’art sont souvent directement tournées vers l’industrie culturelle : design, animation, jeu vidéo. La création artistique est étroitement connectée aux débouchés économiques.
La France maintient un modèle ambigu, dont les effets sociaux et économiques sont de plus en plus contestables. La formation, jugée déconnectée des réalités du quotidien, manque de compétences pratiques et techniques et entretient un entre-soi jugé illusoire et préjudiciable.
Dans les pays anglo-saxons, les écoles d’art fonctionnent selon une logique de marché. Le coût élevé des cours possède au moins le mérite de la clarté. Les institutions forment des professionnels destinés à intégrer des secteurs identifiés (marché de l’art, design, industries créatives). La France, à l’inverse, promet symboliquement une émancipation artistique sans fournir les moyens réels d’en vivre, transférant le risque de l’échec sur les individus plutôt que sur l’institution et ses nombreux fonctionnaires.
Le modèle allemand et nord-européen, quant à lui, assume une certaine sélectivité. Peu d’étudiants sont admis, mais ils bénéficient généralement d’un accompagnement favorable à une insertion durable. Ce choix peut paraître élitiste, mais il limite la production massive de diplômés précaires. En France l’accès est plus large, mais la sortie se fait souvent dans l’isolement et l’instabilité.
Les pays asiatiques, plus pragmatiques, conjuguent enseignements artistiques et industries culturelles, ils considèrent la création comme une compétence productive. Cette orientation réduit la liberté, mais elle garantit une utilité sociale identifiable. En France, au contraire, l’art enseigné demeure souvent déconnecté de toute demande économique, renforçant le sentiment d’un art subventionné pour lui-même.
Les Beaux-Arts en France ne sont ni des centres de formation professionnelle, ni des laboratoires clairement assumés de recherche artistique.
Dès lors, deux options cohérentes se présentent.
- Soit la France engage la refondation radicale de ses écoles d’art, déjà en réduisant leur nombre, ensuite en clarifiant leurs missions et en assumant des critères techniques et de savoir-faire exigeants.
- Soit leur suppression progressive devient une hypothèse complétement légitime en ces temps de budget contraint.
Continuer à financer un système qui produit structurellement de la précarité, tout en invoquant la liberté artistique comme justificatif moral, relève moins de la défense de la culture que d’un aveuglement institutionnel.